Johannesburg bouge à mille à l’heure. Les rues sont larges, les immeubles hauts, le centre ville a mauvaise réputation mais réserve mille trois cent surprises à ceux qui veulent bien s’y promener, les hipsters surlookés et les cafés surstylés colorent le tout. A chaque fois que j’y passe quelques jours, je me rends compte que tout a changé, grosse claque, repères à reprendre, excitation urbaine maximale.
Contrairement à ce que l’on entend souvent, il n’est pas si compliqué de se déplacer dans cette gigantesque ville sans voiture. A condition de connaître le bon signe qui permet d’arrêter le bon minibus, on se débrouille sans trop de problèmes : index vers le haut pour Bree Taxi Rank, index vers le bas pour Parkwood, V avec les quatre doigts pour aller à University of Johannesburg ; c’est une question d’échauffement de la main droite. La nuit, taxi obligatoire, certes, mais la nuit seulement. Et tout le reste peut se faire à pieds à condition, comme pour beaucoup de villes dans le monde, d’ôter ses atouts de décoration classique type montre en or, collier en saphir, appareil photo en bandoulière, sac à main Gucci à paillettes et autres frivolités. Rien d’insurmontable.
A première vue, Joburg est séparée en deux espaces : les quartiers riches (surtout blancs, les banlieues chicos) et les quartiers pauvres (surtout noirs, le centre-ville). En réalité, évidemment et heureusement, les choses sont bien plus entremêlées et le deviennent de plus en plus, années après années.
En tant que visiteur en Afrique du Sud, je pense qu’il faut donner sa chance à Joburg. Car qui lui donne sa chance risque d’être envoûté à tout jamais. Et quoi de mieux que d’être envoûté par une ville qui révèle un peu plus d’elle-même à chaque coup d’œil ?

Petite balade guidée des lieux que j’aime dans le gigantesque centre-ville de Joburg :
Partons de Braamfontein, devant les immenses baies vitrées du tout nouveau Wits Art Museum ; Wits University étant l’une des universités les plus réputées du pays, notamment son département de beaux arts. A deux blocs de là, allons jeter un coup d’œil à l’exposition en cours et à la bibliothèque de la Stevenson Gallery, l’une des deux plus belles à mon sens en Afrique du Sud. Juste à côté, si nous avons oublié notre appareil photo, nous pourrons en trouver un à la boutique Lomography, ou aller acheter un t-shirt dans l’une des petites boutiques très londoniennes de Juta Street.
Un petit creux ? Allons donc siroter un mojito bio (si si, enfin je pense) en dégustant des œufs bénédicte du tonnerre au Neighbourgoods Market, sorte de Shoreditch Market (cf. à Londres) où les hipsters trentenaires aiment promener leur poussette et leurs enfants le samedi matin. Plus cool tu meurs. Pour info, les deux types qui ont créé ce concept l’ont d’abord ouvert à Cape Town (tous les samedis aussi, au Old Biscuit Mill, dans le quartier de Woodstock). Et si pas envie de goûter à tous les stands de chocolats bio et autres fromages de la ferme, on peut aussi aller boire un capouccino dans l’un des petits cafés adorables du quartier, type Doubleshot. A ne pas manquer non plus dans ce quartier qui ne cesse de se construire et de se reconstruire : le Kitchener et le Great Dane, deux bars/boîtes côte à côte où les cool kids se retrouvent pour danser toute la nuit sur le gros son de DJ branchés.
Après ce premier shot, nous traversons l’incroyable Mandela Bridge pour arriver au quartier de Newtown. Après être entrés dans le Market Theatre et avoir vérifié la programmation (souvent excellente) des prochains jours, nous traversons une immense place, juste devant le Museum Africa hélas vraiment pas terrible, puis un petit parc où sont installés plusieurs studios de quelques chorégraphes ou compagnies de danse sud africaines (Moving into Dance, Dance Factory). Encore une rue à traverser et nous arrivons devant le Market Photo Workshop, école de photo plutôt anglée photographie documentaire ou sociale et créée par le géant David Goldblatt, qui diplôme la crème des photographes sud africains et d’ailleurs. Dans la galerie de l’école, on peut discuter avec un élève en vadrouille et lui demander de nous faire visiter l’école, les studios, la chambre noire, tout ça. Convaincus qu’il nous faudra absolument venir étudier ici un jour, on ressort et on arpente les rues de ce drôle de quartier, qui a connu tout un tas d’heures de gloire, qui cache pas mal de bars où les intellectuels se sont retrouvés un jour, où des graffitis recouvrent les murs, où des portraits sculptés en bois sont disséminés.
De Newtown, on file vers Joubert Park. Ce petit parc est le lieu qui a la plus mauvaise réputation de toute la ville – c’est dire – donc, dans le doute, on ne s’y attardera pas. A l’extrémité Sud du parc se trouve la Johannesburg Art Gallery, dont la section contemporaine est hélas en travaux jusqu’à 2015 (nous dit-on), mais qui regroupe malgré tout une intéressante collection d’art moderne et contemporain. Après s’y être un peu attardé, nous faisons quelque chose d’absolument hallucinant pour un petit groupe de blancs en cavale : nous traversons le CBD (Central Business District) à pieds pour rejoindre Main Street et, plus loin, Arts on Main.
Nous sommes dimanche et comme tous les dimanche, Maboneng bat son plein : un groupe d’immeubles et d’entrepôts progressivement réhabilités (par un investisseur privé) en galeries d’art, marché de produits délicieux, restaurants, boutiques ultra pointues et de vintage, hôtel branché, studios aménagés-épurés-designés à louer, fêtes sur les toits et autres réjouissances de gens stylés. Certes, l’endroit dénote un peu dans le quartier mais l’idée de départ, ou l’une d’entre elles, était de faire venir ces gens dans le centre ville tout en faisant en sorte que les habitants « historiques » du quartier ne fuient pas. Pari réussi je crois.
Après un bon dodo, nous repartons le lendemain pour le dernier quartier de cette visite express : Parkwood. Nous nous éloignons ici un peu du centre-ville, mais nous avons devant les yeux quelques galeries d’art contemporain qui valent le déplacement : Goodman Gallery en tout premier lieu, la deuxième plus belle galerie de la ville selon moi (après Stevenson Gallery à Braamfontein, souvenez-vous – les deux sont aussi basées à Cape Town), mais aussi, pour la plupart sur Jan Smuts Avenue, plusieurs autres galeries : ArtSpace, David Krut Projects, Resolution Gallery, Gallery 2, Momo Gallery, Everard Read Gallery (plus commerciale), Art One Sixty, etc. De quoi s’en mettre plein les yeux.
Nous pourrons éventuellement ensuite aller reposer nos pieds à Zoo Lake, immense parc où les familles de toutes les couleurs dégustent des braais (barbecues locaux) le weekend.
Un dernier endroit à visiter selon moi – et celle fois-ci beaucoup moins cooool que tous ceux décrits précédemment – est l’Apartheid Museum. Extraordinaire scénographie, extraordinaires documents présentés, extraordinaire plongeon dans l’Histoire.
Il y a sans aucune doute des milliers d’autres lieux à découvrir à Johannesburg mais j’espère que cette rapide description vous aura en tout cas donné envie de vous arrêter plus que quelques heures lors d’une visite en Afrique du Sud.